
Confinée déconfinée reconfinée
Masquée démasquée
Peu de visites pas de sorties
Je suis à nouveau attachée à mon pieu
Certes au plus bel endroit du pré
Avec une corde longue d’un kilomètre
Mais chaque jour
Je regarde la montagne et je me dis
-Comme on doit être bien là-haut. Quel plaisir de gambader dans la bruyère sans cette maudite longe qui m’écorche le cou !
Je veux aller où j’ai envie, monsieur Président
– Mais, malheureuse, tu ne sais pas qu’il y a le virus là-bas…
Que feras-tu quand il te tombera dessus ?
-Je lui donnerai des coups de cornes, monsieur Président.
– Le virus se moque bien de tes cornes. Il m’a tué des biques autrement encornées que toi… Tu sais bien, la vieille qui était ici l’an dernier ? une maîtresse chèvre, forte et méchante comme un bouc. Elle s’est battue avec le virus toute la nuit… puis, le matin, elle a rendu l’âme.
-Pauvre ! Ça ne fait rien, monsieur, laissez-moi aller où je veux. Je porterai mon masque, je respecterai tout le protocole sanitaire
-Encore une que le virus va tuer… Eh bien, non… je te sauverai malgré toi, coquine et de peur que tu ne rompes ta corde, je vais t’enfermer ici, et tu y resteras tranquille.
Il avait laissé une fenêtre ouverte, et à peine eut-il le dos tourné que je me suis en allée.
Quand je suis arrivée dans la montagne, ce fut un ravissement général. Jamais les vieux sapins n’avaient rien vu d’aussi heureux. On me reçut comme une petite reine.
Les châtaigniers se baissaient jusqu’à terre pour me caresser du bout de leurs branches. Les genêts d’or s’ouvraient sur mon passage et sentaient bon tant qu’ils pouvaient. Toute la montagne me fit fête.
Plus de corde, plus de pieu… rien qui m’empêchait d’aller à ma guise. Et quelle bonne herbe ! Savoureuse, fine, dentelée, faite de mille plantes. Et les fleurs, de grandes campanules bleues, des digitales de pourpre à longs calices, toute une forêt de fleurs sauvages débordant de sucs capiteux !
Je me vautrais là-dedans et roulais le long des talus, pêle-mêle avec les feuilles tombées et les châtaignes.
Je me suis avancée au bord du plateau, une fleur de cytise aux dents, et j’aperçu en bas, tout en bas dans la plaine, mon EHPAD avec le pré derrière. Cela me fit rire jaune, rire aux larmes.
-Que c’est petit ! Comment ai-je pu tenir là-dedans ?
Tout à coup, le vent fraîchit. La montagne devint violette, c’était le soir.
En bas, l’EHPAD disparaissait dans le brouillard, on ne voyait plus que le toit avec un peu de fumée. Un truc me frôla en passant. Je tressaillis. Puis ce fut un hurlement
-Hou hou ! Je suis le vilain virus, celui qui saute sur les vieux.
Je pensais aussitôt au Président. Au même moment la cloche sonna. C’était l’heure du repas.
jamadrou © "Mes mots pour me raconter" 31 oct 20 Nouvelle largement inspirée par l’actualité et La Chèvre de monsieur Seguin , Lettres de mon moulin d'Alphonse Daudet nouvelle dont toutes les mémés et tous les pépés se souviennent .
Ah les lettres de mon Moulin !
j’espère que cette petite chèvre rejoindra son enclos sans souci car prudente elle était sortie masquée…
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Josette elle est entrée dans son rêve masquée elle en est ressorti toujours masquée mais un peu désorientée, réveillée brutalement par la sonnerie du repas 😦
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Bravo ! très belle et juste inspiration !
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Merci petit papillon rouge!
🦋🐐🦋🐐🦋🐐🦋🐐🦋
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C’est quand on est privé de liberté qu’on en rêve de tout son être, même nos petits vieux dans leur home, madame Blanquette, monsieur Seguin… C’est pour votre bien cette « corde au cou », vous êtes proie facile pour le « loup » !! Dur dur la vie en chambre… ,-)
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Tu en sais quelque chose Jill ton papa Albert a bien connu…
Heureusement il n’a pas connu le Covid !!
Bisou Jill
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Excellent ! C’est délicieux de relire ce joli texte si émouvant.
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Comme c’est BON et agréable, Jamadrou !
Super !!!
Bon dimanche !
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Merci Colette
Un bon dimanche à toi également
🐐😘
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😀 ❤
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C’est en acceptant notre prison
que nous trouvons la Liberté
cette Liberté que rien ne pourra jamais enfermer
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C’est en acceptant notre prison
que nous trouverons la liberté
cette liberté qui ne pourra jamais être enfermée
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Et surtout Pascal apprécions d’être en vie !
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Serions-nous tous une pauvre chèvre attaché à un pieu ! Il y a maintes de vibre le confinement. Bonne journée. Daniel
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Nous sommes plutôt devenus chèvre à force d’entendre les ordres et contre ordre de nos dirigeants et les commentaires de tout un chacun!
Oui il y a maintes façon de vivre au mieux confinement télé travail courses vie de famille plaisir des petites promenades vigilance envers les personnes seules…
Apprendre à trouver l’essentiel
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J’ai adoré…
C’est vrai que nous devenons tous un peu chèvre, et je me demande bien ce qu’en dirait Daudet. 🙂
Passe une douce journée.
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Soyons chèvres raisonnables mais toujours curieuses et pas dupes d’un monsieur seguin qui a perdu le nord.
Bonne semaine Quichottine
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Bonne semaine à toi aussi. 🙂
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