Vision

Porte-voix
Méga mégaphone
Pour amplifier tes mots et les rendre audibles à la planète entière.
Mais toi, l’hurluberlu, tu cherches à voir à travers ce porte voix.
Et tu t’aperçois qu’au loin l’horizon n’est pas une ligne
 mais une immense visionneuse d’images, mirage.
Te voilà devenu visionnaire.
Tu te concentres et tu entends alors des voix,
 des paroles que tu devines divines.
Manifestations extra-ordinaires préternaturelles
 amplifiées par cet immense porte-voix que tu peux, 
de la simple force de ta volonté, 
transformer en visionneuse super grossissante du monde invisible. 
Certains diront que tu as une perception étrange des choses, 
que tu as des visions, celles d’un poète dérangé.
Les visions ce sont bien des images et les images des allégories?
Et toi, en plus des images, tu entends des voix ;
 des paroles qui ne sont adressées qu’à toi.
Te connaissant bien, je sais que tu as conscience
 que tout cela n’appartient pas au monde commun
 mais présente bien une réalité surnaturelle. 
Je sais aussi que tu as conscience que ce n’est pas imagination,
 mais offrande donnée à ta propre perception du monde.
Je sais aussi, car tu m’en as souvent parlé, que tu es conscient 
que ça ne correspond pas à la perception usuelle du commun des mortels.
Tu n’as jamais cherché à vérifier ce que tu vois et ce que tu entends.
Mais tu écris chaque jours
 poésies, haïkus, paraboles, fables, psaumes, ballades, épigrammes… 
tous plus merveilleux les uns que les autres.
Tu es malheureux car tu te rends bien compte 
que tu ne peux pas partir en explorateur autour de ton mirage, 
tu ne peux faire aucune vérification.
Si tu vois un bourgeon sur un nuage, 
tu sais que la branche existe
 et tu sais que feuilles ou fleurs demain seront réelles.
Aujourd’hui, ce que tu as vu et entendu dans ce porte-voix te fait frémir, 
tu as peur.
Tu as compris que le prochain bourgeon serait le dernier.
Et pour la première fois, affolé, 
tu m’as chuchoté à l’oreille 
que tu espérais non pas avoir des visions
mais être sujet aux hallucinations…

jamadrou © "Histoire farfelue" mars 2020